25 Sep 119e Congrès des notaires de France : le logement, le devoir de faire mieux, le droit pour faire autrement
Du 27 au 29 septembre aura lieu le 119e congrès des notaires de France, avec cette année un thème d’actualité : le logement, avec comme sous-titre « le devoir de faire mieux, le droit pour faire autrement ».
Lieu de vie ou d’une vie qui voit grandir les enfants et les petits-enfants, le logement est au centre des préoccupations des français. L’accession à la propriété demeure le souhait de 80% d’entre eux et nos aînés veulent rester chez eux le plus longtemps possible. De surcroît, le logement qui occupe une place centrale dans l’activité des notaires constitue bien souvent l’actif principal voire le seul actif de leurs clients.
Produire, accéder, pérenniser : plusieurs défis de tailles attendent les acteurs du logement dans leur globalité. Il faut loger de plus en plus de monde quand la loi Climat et résilience impose une réduction drastique de la consommation d’espaces à l’horizon 2050. Accéder au logement se complexifie avec un marché du neuf impacté par l’inflation, un marché de l’ancien contraint par la rénovation énergétique des bâtiments et une hausse des intérêts qui empêche de nombreux ménages d’acquérir. La question de la pérennisation se pose à l’heure où les « baby-boomers » vont entrer dans le grand âge, quand on sait que la plupart de nos aînés souhaitent vieillir chez eux et que depuis une vingtaine d’années, nous assistons à une paupérisation des plus de 80 ans.
Les notaires, lors du 119e Congrès des notaires de France, vont faire une série de propositions structurelles pragmatiques et opérationnelles afin d’identifier les points de blocage à améliorer pour mettre en place une structure juridique qui s’inscrit dans le long terme. Pour répondre au besoin de logements tout en parvenant à une sobriété nouvelle (ZAN) permettre à chacun de vivre dans un logement décent et y vivre longtemps, avec la performance énergétique du bâti au cœur de chaque projet.
Développer l’offre de logement
Proposition n°1 : Réduire la durée d’obtention d’un permis de construire définitif par la concertation et par une instruction collégiale et certifiée des projets
Les constats :
- Décalage entre les délais théoriques et les délais observés dans la pratique. En cause, les procédures de préinstruction à géométrie variable mais aussi les recours contentieux.
Les propositions du Congrès des Notaires de France :
- Faciliter la procédure de concertation facultative avec le public (Article 300-2 du Code de l’urbanisme) pour tout projet d’opération portant sur la construction de logements avant le dépôt de demande des autorisations, réalisée à l’initiative de l’autorité compétente ou du maître d’ouvrage.
- Proposer une période de dialogue d’un mois avec les services instructeurs et les administrations concernées plutôt que l’actuel délai d’un mois réservé aux demandes de pièces complémentaires.
- Créer un certificat d’instruction sur le modèle du certificat de projet créé pour les friches industrielles liant les différents services sur les règles applicables au projet et sur les délais de délivrance des autorisations.
- Conditionner, après la concertation préalable, les recours des associations (Article L.601-1 du Code de l’urbanisme) à leur participation à la concertation.
Proposition n°2 : Développer les partenariats entre le public et le privé notamment par la simplification de la commande publique
Les constats :
- Les objectifs de sobriété foncière et de mixité sociale et fonctionnelle impliquent des rapprochements entre acteurs publics et privés ;
- Les dérogations existantes au droit de la commande publique ne permettent pas toujours de répondre aux besoins en logements et en équipements publics ;
- Un équilibre entre maîtrise d’ouvrage publique et privée doit être maintenu.
Les propositions du Congrès :
- Faciliter la prise en compte des besoins des bailleurs sociaux quand ils achètent en VEFA ;
- Simplifier l’utilisation de la commande publique quand cela est nécessaire, en ouvrant par exemple la possibilité aux bailleurs sociaux et intermédiaires la possibilité de constituer des sociétés d’économie mixte à projet unique.
Proposition n°3 : Instituer une autorisation d’urbanisme favorisant la réversibilité du bâti en faveur du logement
Les constats :
- Climat, énergie et environnement sont des facteurs à prendre en compte dans la réalisation des nouvelles opérations de construction ;
- Il faut surmonter l’obsolescence d’un premier usage d’un bâtiment et la vacance qui s’en suit en prévoyant sa réversibilité (pas de transformations lourdes, limitation de l’artificialisation des sols, possibilité de mixité sociale et fonctionnelle).
Les propositions :
- Créer un statut juridique pour la construction réversible avec un volet législatif pour encadrer le dispositif, un volet administratif pour préciser les conditions d’instructions des permis et un volet fiscal pour favoriser la transformation des locaux vacants vers la destination habitation.
Proposition n°4 : Favoriser la concordance entre les cahiers des charges des lotissements et la règlementation d’urbanisme en faveur du logement
Les constats :
- Les cahiers des charges peuvent présenter des discordances avec les objectifs de développement d’offres de logement résultant des documents d’urbanisme.
Les propositions du Congrès :
- Ouvrir la mise en concordance des cahiers des charges de lotissements avec les documents d’urbanisme applicables à l’initiative d’un coloti à condition qu’il y ait un projet de demande d’autorisation d’urbanisme à destination d’habitation ;
- Établir les cahiers des charges et leurs évolutions par acte authentique.
Développer l’accession au logement
Proposition n°5 : Créer un statut fiscal du bailleur privé global, cohérent et attractif
Les constats :
- L’investissement locatif par des bailleurs privés est nécessaire ;
- Les normes écologiques imposent au bailleur privé de financer des dépenses importantes d’entretien et de rénovation ;
- Les règles fiscales actuelles donnent plus d’importance à la location en meublé par rapport à la location d’un logement nu.
Les propositions du Congrès :
- Pouvoir opter, pour le bailleur, soit pour la taxation des revenus locatifs nus ou meublés au titre des revenus fonciers soit pour la taxation au titre des bénéfices industriels ou commerciaux ;
- Appliquer le statut de loueur professionnel, limité aujourd’hui au loueur en meublé, au loueur de logements nus ;
- Plafonner les prélèvements obligatoires en fonction du revenu généré par chaque logement.
Proposition n°6 : Créer une égalité de traitement fiscal de la performance énergétique pour les logements nus ou meublés, neufs ou anciens
Les constats :
- La performance énergétique des logements est un enjeu économique considérable pour les bailleurs ;
- Le déficit foncier (réalisation de travaux de rénovation énergétique dans la limite de 10700€ par an) imputable sur le revenu global du contribuable n’est prévu que pour le parc de logements anciens loués nus.
Les propositions du Congrès :
- Étendre aux logements loués en meublé et dont la taxation relève des BIC le dispositif du déficit foncier imputable sur le revenu global ;
- Identifier une charge fiscale de performance énergétique pour l’acquisition des logements en VEFA ou en VIR déductible pour l’achat d’un logement locatif.
- Conditions d’application, montant et imputation du déficit : https://www.calameo.com/read/00512519800cd42472d1b?authid=QoQPadyDzhVA
Proposition n°7 : Généraliser une offre locative privée solidaire avec le dispositif « Loc’avantages »
Les constats :
- Le dispositif « Loc’avantages » permet au bailleur qui y adhère de bénéficier d’une réduction d’impôt en contrepartie de la location de son bien à un prix inférieur au marché.
- De nombreuses conditions doivent être remplies : le bien doit être loué nu au moins 6 ans, être à usage de résidence principale au bénéfice d’un locataire sous conditions de ressources. Ces conditions sont reprises dans une convention signée entre le bailleur et l’Agence nationale pour l’Amélioration de l’Habitat (ANAH).
Les propositions du Congrès :
- Étendre le dispositif aux logements loués en meublé ;
- Simplifier le dispositif en le rendant déclaratif et réserver le conventionnement avec l’ANAH quand l’agence subventionne des travaux réalisés dans le logement.
Proposition n°8 : simplifier et généraliser le droit de préemption du locataire pour favoriser l’accession à la propriété
Les constats :
- Le droit de préemption résultant du congé pour vente ne concerne pas le logement meublé.
Les propositions :
- Créer un droit de préemption au profit du locataire en cas de toute vente en cours de bail, que le logement soit loué nu ou meublé ;
- Inclure les meubles inventoriés dans le bail en cas de vente d’un logement meublé et proroger le bail de plein droit jusqu’au dernier jour du délai dont le locataire dispose pour la réalisation de l’acte de vente.
Proposition n°9 : Maintenir dans le temps les décotes consenties au premier accédant dans les modes d’accession à la propriété
Les constats :
- Il existe de nombreux dispositifs qui permettent aux accédants à la propriété sous conditions de ressources de bénéficier de prix décoté, maîtrisé ou aidé ;
- La décote n’est créée au profit que du premier accédant, il existe des clauses de non-spéculation imposées conventionnellement ou légalement qui sont limitées dans le temps ;
- Le bail réel solidaire corrige ces difficultés par la maîtrise du prix initial et les prix de cession mais ne peut pas être la seule solution.
Les propositions du Congrès :
- Créer un régime juridique commun aux modes d’accession aidée qui va définir les modes d’accession et déterminer deux plafonds applicables pour une durée de trente ans : un plafond de prix de revente qui reflète la décote initiale accordée et un plafond de ressources pour les candidats à l’accession au logement aidé.
Pérenniser le logement
Proposition n°10 : Pérenniser le logement du dirigeant de société : étendre l’insaisissabilité de la résidence principale
Les constats :
- Le logement du dirigeant de société est plus exposé aux poursuites des créanciers professionnels que celui de l’entrepreneur individuel, dont le logement, depuis la loi du 14 février 2022 en faveur de l’activité professionnelle indépendante, est automatiquement protégé des créanciers professionnels.
Les propositions du Congrès :
- Étendre aux dirigeants de société le bénéfice de l’insaisissabilité automatique de la résidence principale.
Proposition n°11 : pérenniser le logement de nos aînés
Les constats :
- Le Conseil d’orientation des retraites prévoit, au regard du vieillissement de la population et de l’allongement de la durée de vie, une baisse du niveau des retraites ;
- La paupérisation des plus de 80 ans progresse ;
- 75% des plus de 60 ans sont propriétaires de leur logement.
Les propositions du Congrès :
- Repenser la vente en viager en famille afin que la monétisation du patrimoine immobilier pouvant financer le grand âge s’opère dans le cadre familial ;
- Repenser le prêt viager hypothécaire dans le cadre familial afin d’en faire une source incontournable du financement de la dépendance.
Proposition n°12 : Pérenniser le logement de la famille – rétablir l’esprit de l’article 215 – alinéa 3 du Code civil
Les constats :
- Dans le cadre du mariage, le logement de famille est soumis à une cogestion (vente, échange, apport en société, donation etc.) indépendamment du droit de propriété (Article 215 alinéa 3 du Code civil) ;
- Cette règle de cogestion présente une cause et un objet uniques : elle est un effet du mariage et vise la préservation du logement ;
- Cependant la jurisprudence fait de cette règle une application paradoxale dont il résulte une imprévisibilité qu’il est possible de corriger.
Les propositions du 119e Congrès des Notaires :
- Préciser à l’article 215 alinéa 3 du Code civil que sont visés les droits de toute nature par lesquels est assuré le logement ;
- Prévoir un renvoi aux mesures provisoires susceptibles d’être prononcées par le juge en cas de divorce.
Proposition commune aux trois commissions : Développer des solutions d’externalisation et de tiers financement pour la rénovation énergétique
Les constats :
- La rénovation énergétique des logements doit être accélérée au vu des objectifs de performance énergétique que doit atteindre le parc immobilier à l’horizon 2050 ;
- Elle ne peut être limitée aux économies d’énergie mais doit être pensée dans sa globalité (performance intérieure et extérieure) ;
- Les opérations de rénovation énergétiques des logements sont complexes en monopropriété (trouver les entreprises qualifiées, coût des travaux, calcul et demande des aides) ;
- En copropriété, l’opération est complexifiée : rénovation des parties communes, intervention sur les parties privatives, coût pour les copropriétaires.
Les propositions du Congrès des Notaires
- Ouvrir le recours au bail à réhabilitation (son champ est aujourd’hui limité aux bailleurs sociaux et structures assimilées) à toute personne physique ou morale afin de réaliser des opérations de rénovation énergétique globale des parties communes et privatives ;
- Permettre aux organismes fonciers solidaires (OFS) de porter sur une longue durée le financement de la rénovation énergétique des logements en copropriétés soumis au bail réel solidaire ;
- Permettre la mise en place d’un contrat de performance énergétique (CPE) par une personne publique ou parapublique compétente en matière d’aménagement pour la rénovation de plusieurs copropriétés afin d’envisager la rénovation du bâti à l’échelle du quartier.
Cet article a été élaboré à partir des documents disponibles sur https://www.congresdesnotaires.fr/fr/ / https://www.congresdesnotaires.fr/fr/les-congres/edition-2023/propositions/